ECOLE SUPÉRIEURE DES SCIENCES ET TECHNIQUES DE L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION || ADVANCED SCHOOL OF MASS COMMUNICATION

 

Présentation

ARGUMENTAIRE

L’École Supérieure des Sciences et Techniques de l’Information et de la Communication de l’Université de Yaoundé 2, entend se doter d’un laboratoire de recherches en sciences et techniques de l’information et de la communication, embrassant l’ensemble des domaines d’études sur lesquels s’appuient les Départements qui la constituent.

Le présent projet, supervisé par Madame le Directeur de l’ESSTIC et Monsieur le Directeur Adjoint chargé des Études, a pour objet, de définir et baliser les thématiques, les axes et les programmes de recherches possibles, avec un double ancrage (universalisme et culturalisme), afin de faire de l’ESSTIC, un véritable creuset de la recherche dans ce vaste champ. Ainsi, trois (03) thématiques générales vont structurer les activités du laboratoire :

Thématique 1. Industries culturelles, éducatives et créatives : reconfiguration des secteurs et logiques émergentes 

Au sein de la thématique 1, les travaux menés sont tout d’abord centrés sur l’industrialisation de la culture, de l’information et de la communication, puis sur les modèles socio-économiques des industries culturelles, éducatives et créatives, avec une emphase sur les phénomènes de concentration et de financiarisation, sur les modes d’articulation entre filières, mais aussi entre industrie et artisanat ou autoproduction. Ces recherches menées de façon transversale ou à l’échelle sectorielle s’intéressent aux filières traditionnelles (édition, presse, télévision, radio, cinéma, musique, éducation, jeu …) aussi bien qu’aux acteurs, productions et dispositifs les plus récents. Elles intègrent le plus souvent une forte dimension internationale (du local vers le global), la prise en compte des politiques publiques et des enjeux idéologiques et sociétaux.

Les travaux de cette thématique conjuguent des analyses sectorielles portant sur les grands secteurs (presse, édition-librairie, industries éducatives, productions artistiques, spectacle vivant, audiovisuel, arts numériques, jeu vidéo) et analyses intersectorielles, condition sine qua non d’un travail de fond sur les modes d’industrialisation, de marchandisation et d’adaptation de ces secteurs aux contextes internationaux. Ces analyses transversales permettent d’examiner comment dans les différentes filières des industries culturelles, les modalités de création, production, reproduction, distribution, promotion, valorisation évoluent face à divers mouvements transversaux, dont l’entrée dans ces marchés des grands acteurs des industries de la communication (les GAFAM en particulier).

Les enjeux de politique publique (tels que le subventionnement de la production ou celui de la diffusion notamment), ceux qui touchent à l’organisation des filières (oligopoles à franges) et de la main d’œuvre (le « vivier »), devraient conduire, par exemple à étudier comment l’entrée des industries de la communication à différents niveaux des filières, de la création à la diffusion, transforme les équilibres en place. Les exemples africains deviennent légion (Nigeria, Afrique du Sud, Kenya etc.)

Dans le prolongement de travaux sur les rapports entre industries de la culture et industries de la communication, l’Ecole sera aussi amenée à développer une interrogation sur les mouvements dits d’ « économisation » de la culture et de « culturalisation » de l’économie : comment des entreprises culturelles incorporent-elles des modes de fonctionnement relevant des industries non culturelles et comment des entreprises non culturelles importent-elles des modalités de fonctionnement habituelles au sein des industries culturelles et tendent-elles à devenir des industries des biens symboliques ?

La dynamique de ces recherches   permettra aussi à l’Etablissement de relier les interrogations précédentes avec celle de la territorialisation des activités culturelles et de communication afin d’étudier comment le mouvement de transformation d’entreprises culturelles ou aussi d’entreprises non culturelles en industries des biens symboliques peut conduire à des valorisations par une insertion territoriale, à l’image des Smart Cities au Kenya, à l’Île Maurice ou en Afrique du Sud.

Thématique 2. Espaces publics : circulation des discours et des modèles

La thématique 2 s’intéresse aux espaces publics abordés dans le temps long par le moyen de travaux interdisciplinaires associant l’histoire, la sociologie, les sciences politiques, la sémio-pragmatique, et les aspects proprement info-communicationnels. Elle cherche à mettre en évidence les évolutions et continuités des pratiques et dispositifs médiatiques. Les travaux situés dans cette thématique peuvent s’articuler autour des questions de fabrique de la norme, de sa circulation et de ses réceptions.

Au sein de l’espace public, les médias sont considérés comme creuset de fabrication et espace de circulation des normes et stéréotypes. Les projets autour de la presse, pris en compte par quelques entreprises, sont appelés à se développer. La presse en général et la presse magazine, en particulier, sont envisagées comme un observatoire de la dynamique des industries culturelles : par le renouvellement des titres, elle montre, au cours du temps, quels sont les secteurs dynamiques du monde des industries culturelles. La presse magazine généraliste peut, quant à elle, être prise comme un observatoire des pratiques culturelles des Camerounais.

La fabrique et la reproduction des normes de genre doivent être au cœur des travaux, que ce soit au niveau de la production des industries culturelles (travaux sur la sociologie des professions), de la représentation des hommes, des femmes et de la diversité dans les productions des industries culturelles et, enfin, autour de la réception de ces objets. La question du marketing « genré » sera en particulier interrogée.

La question de la circulation des normes dans l’espace public reste centrale pour les travaux de cette thématique. Elle est abordée sous l’angle historique par l’interrogation des discours de construction des normes, en particulier dans les médias et au sujet de la représentation des corps, des images de la maternité, de la circulation des stéréotypes… Les nouveaux médias s’emparent en particulier des négociations de normes autour de la parentalité.

La place de la diversité ethno-culturelle et linguistique dans les arts et les médias est également interrogée et conduit à des travaux sur la manière dont le multiculturel ou l’interculturel et le multilinguisme traversent les pratiques de création et de diffusion développées par les artistes et les institutions artistiques et culturelles comme par les industries culturelles. Cette question de la diversité peut devenir un nouveau chantier important, en lien avec la question de la visibilité médiatique des minorités, et en parallèle avec les recherches sur le développement de la diversité en entreprise. La question permet, de plus, d’interroger les politiques culturelles « à la camerounaise ».

Thématique 3. Innovations en communication : dispositifs, normes et usages

La thématique 3 vise prioritairement l’étude des conditions techniques, organisationnelles et sociologiques de l’émergence, de la diffusion et des usages des innovations en communication : mise en réseau, normes d’action, formes de gestion du social, dispositifs de mobilisation, dispositifs de surveillance des données, médiations dans différents champs. Les travaux menés ont en commun d’étudier les innovations et dispositifs en voie d’industrialisation rapide que cela soit au sein de différentes organisations ou secteurs d’activités.

Cette thématique se développera dans un premier temps autour d’une approche que l’on pourrait qualifier de socio-technique des innovations en communication, puis l’évolution féconde des travaux de recherche peut permettre de déployer une approche critique des dispositifs numériques (en liaison avec les Ecoles polytechniques du Cameroun et d’ailleurs).

Les recherches menées se déclinent autour de 4 axes majeurs :

  • Hyperconnectivité, processus de plateformisation, d’algorithmisation de la société tout en tenant compte des enjeux économiques, sociaux et environnementaux.
  • Mobilisation par le numérique et normes d’action communicationnelle : circulation des modèles et des pratiques entre le champ des industries de la culture et de la communication et le champ socio-politique.
  • Processus, outils méthodes de créativité et de design d’interfaces numériques dans les industries de la communication.
  • Approche critique des usages et médiations numériques auprès des publics, des organisations et des pratiques artistiques, culturelles éducatives et patrimoniales

De nombreux programmes de recherche seront conduits en partenariat ou dans le cadre d’appels à projets de différents organismes : « Communication, médias et liens sociaux au Cameroun, en CEMAC ou en Afrique francophone. Nouveaux supports, nouvelles pratiques ; Arts numériques et positionnement socioprofessionnel;  Modélisation et simulation du patrimoine : pour une évaluation critique des applications numériques et Vers une politique numérique et des applications “durables” des institutions patrimoniales ; Dispositifs numériques de communication, Programme de recherche « Fractures corporelles, fractures Numériques » ; ou encore dans le cadre de commandes d’études d’usages numériques, notamment dans le milieu culturel. La production scientifique donne également lieu à de nombreuses publications, journées d’étude et conférences.

Six (06) axes de recherche ont pu être identifiés pour servir d’aiguillon à la recherche au sein du laboratoire :

  1. Médias et journalisme

Les recherches sur les médias et le journalisme abordent des questions à fort enjeu social et politique. Elles visent à rendre intelligible la fabrique des discours publics, médiatiques et politiques, dont ceux touchant, par exemple, à l’environnement, à la santé, à l’égalité et aux inégalités, aux usages des data, aux violences, aux migrations. Qu’il soit question de la médiatisation du terrorisme ou du rôle des journalistes face à la terreur, des risques industriels, climatiques, sanitaires, de l’influence des discours sur les réseaux sociaux et, plus largement, de l’internet dans la construction des débats publics, sociaux et politiques, les recherches sur le journalisme et les médias permettent de comprendre les processus professionnels et communicationnels qui forgent les représentations communes, les repères sociaux et politiques qui configurent les événements, contribuent à la formation d’espaces publics pluriels et définissent des arènes dans lesquelles les acteurs de la démocratie ont à prendre position. Quelques questions travaillées dans des contrats de recherche peuvent ainsi être citées en exemple : les représentations du risque économique dans les médias et la participation des journalistes aux processus de concertation, la participation
des médias à l’émergence des mouvements politiques et sociaux, la diaspora et la dispute médiatique, la médiatisation des violences faites aux femmes et aux enfants, les journalistes et les fake news, les liens entre médias et publicité, la médiatisation de la vie politique, les catastrophes climatiques, la place des femmes dans la vie politique et publique ou dans les rédactions, les identités territoriales ou encore les émotions sociales face aux attentats. Les recherches menées en sciences de l’information et de la communication (sic) sur les médias et le journalisme participent par ailleurs de l’appui des formations au journalisme en permettant d’articuler fortement enseignement et recherche.

Qu’elles soient dispensées dans des écoles et cursus reconnus par la profession et/ou dans des diplômes relevant des instituts privés d’enseignement supérieurs (IPES),
les préparations aux métiers du journalisme et des médias sont souvent assurées par des enseignants-chercheurs de la discipline, qui travaillent aux côtés des journalistes. Les approches critiques universitaires forment ainsi un ensemble de savoirs complémentaires des savoirs professionnels dispensés dans les cursus spécialisés. La discipline joue ainsi un rôle majeur dans la formation de celles et ceux qui assureront, dans les années à venir, la mise en scène et en mots des opinions et des débats dans les sociétés démocratiques ou en cours de démocratisation.

  1. Images, cinéma, médias audiovisuels et industries culturelles

Les médias centrés sur la production et la diffusion des images – fixes et animées – sont un objet essentiel des sciences et techniques de l’information et de la
communication (stic). Cinéma, audiovisuel (en particulier télévision), édition
(en particulier romans et bandes dessinées) et, désormais, jeu vidéo et webvidéos, sont autant de médias qui ont intéressé la recherche en stic par le prisme de l’analyse de leurs productions et consommations, largement industrialisées. Ces multiples analyses ont permis de prendre la mesure des enjeux socio-culturels et socio-politiques de ces médias aux prises avec des mutations sociales et techniques, dont le passage au « numérique » et la densification des réseaux ne sont pas les moindres. Sans cesse renouvelées par les innovations, les images audiovisuelles et cinématographiques ont ainsi été un objet d’analyse central des stic depuis leur constitution au milieu des années 1970. Ce domaine des stic s’appuie sur plusieurs traditions de recherche : sémiologie de l’image, du cinéma et de l’audiovisuel, économie politique de la communication, analyses socio-économiques et socio-politiques des médias. Les travaux sur la télévision, média dominant des années 1980-2000, ont particulièrement marqué le domaine et permis le croisement de nombreuses approches. Trois questions orientent la réflexion : la première est centrée sur la prise en compte des formes et contenus médiatiques, considérés dans la majeure partie des travaux comme des « discours » sur le monde et sur la société ; la deuxième s’interroge sur les études spécifiques à ces médias de l’image et du son, études renouvelées dans le contexte de mutations techniques actuel ; tandis que la troisième prend en considération le caractère industriel des médias audiovisuels et du cinéma, fortement marqués par leur structuration en filières et leur insertion dans un cadre légal.

  1. Communication publique et politique

Les sciences et techniques de l’information et de la communication (stic) analysent les transformations de l’espace public démocratique, des formes de gouvernement et de la production de normes. Dans l’espace pluridisciplinaire des études sur les rapports entre le politique, le civique et la communication, les travaux des chercheurs en stic devraient présenter des apports spécifiques.

En premier lieu, leur attention aux formes, aux formats ou aux dispositifs
constitutifs des communications, des médiations et des interactions entre les structures et les citoyens : les stic interrogent la légitimation politique ou les débats publics en prenant en considération leur matérialité – qu’elle soit constituée par du discours, des images et, ou des dispositifs socio-techniques diversifiés – en la mettant en rapport avec ses conditions sociales et politiques de production et de réception. Ensuite, les travaux doivent donner une autonomie à la dimension communicationnelle et médiatique du travail politique, aussi bien dans les partis, notamment pendant les campagnes électorales, dans les institutions que dans les mouvements sociaux. Cette mise en évidence de la spécialisation et de la professionnalisation des activités relevant de communication au sens large (par exemple dans le cas de la communication des institutions publiques) permet de dégager le renouvellement des contraintes qui pèsent sur le travail des journalistes et des relations de pouvoir qui configurent les débats publics contemporains – sur la santé, sur l’environnement, sur les sciences, sur l’aménagement urbain, sur le terrorisme, sur les phénomènes sociaux tels que la corruption, le tribalisme. Enfin, les travaux devront contribuer à la critique du prophétisme ou du déterminisme attachés aux techniques de l’information et de la communication, tout en mettant en évidence les stratégies et logiques des acteurs politiques et sociaux qui les mobilisent. Espaces publics, démocratie numérique, discours politiques, données ouvertes, média-activisme, participation, structurent cet axe de recherche.

  1. Communications et organisations

Les recherches centrées sur l’analyse des objets, situations, pratiques et processus informationnels et communicationnels qui traversent et structurent les
organisations sont plurielles et fructueuses depuis plus de deux décennies au
sein des sciences de l’information et de la communication (sic). Les
organisations considérées appartiennent au secteur privé et au secteur public. Elles peuvent être des entreprises marchandes (industrielles ou de services), des organisations liées à la société civile (associations, ong, etc.), des institutions
publiques ainsi que des organisations en cours d’émergence, notamment via des dispositifs numériques ou dans le cadre de la transition écologique (formes hybrides impliquant par exemple pouvoirs publics, entreprises et laboratoires), dont les chercheurs devraient tenter d’appréhender et de qualifier la construction. Les terrains étudiés sont nombreux : service d’un ministère, hôpital, université, collectivité territoriale, parti politique, think tank, ong, grande entreprise, pme, association internationale, régionale ou locale, réseau d’échange et de partage, collectifs sur l’internet ou sur les réseaux intranets. Ces organisations feront l’objet d’analyses sous de multiples angles. Les métiers, pratiques professionnelles et les secteurs d’activité observés sont également très variés : association, crise, entreprise, éthique, gouvernance, institution, management, numérique, rationalisation, régulation, travail constituent les concepts structurant de cet axe.

  1. Numérique : stratégies, dispositifs et usages

En l’espace d’une quinzaine d’années, un déplacement général s’est opéré : de nouvel objet d’étude, le numérique est devenu le centre de la plupart des nouveaux objets, à la fois écosystème et horizon de bien des questions de recherche. Dans le même temps, voyant leur objet propulsé au cœur des stratégies industrielles, des enjeux de politiques publiques et des grands débats de société, les sciences et techniques de l’information et de la communication
(stic) ont vu leur expertise de plus en plus sollicitée, quand elle n’était pas purement et simplement instrumentalisée par des intérêts externes au champ scientifique. Devenu passe-partout, le mot « numérique » s’est alors bien souvent vidé de sens, fonctionnant comme un simple sésame vers d’hypothétiques certifications de conformité ou de modernité. Pour autant, ces effets d’annonce ou d’étiquette ne doivent pas dissimuler l’ampleur, le dynamisme et la diversité des recherches qui construisent le numérique en objet scientifique et, ce faisant, contribuent à reconfigurer le champ disciplinaire

            De fait, les notions mêmes d’information et de communication qui l’identifient se trouvent sinon redéfinies du moins transformées en profondeur autant qu’en extension par l’essor des technologies, des économies et des usages numériques.
Compétences digitales, design numérique, dispositif digital, écosystème numérique, identité en ligne, logiques algorithmiques, sociabilité à distance, structurent cet axe de recherche.

  1. Information, documents et écritures

Dès leur institutionnalisation, les sciences et techniques de l’information et de la communication (stic) ont placé l’information au centre de leurs investigations, comme en témoigne le nom de la discipline. Une vraie difficulté émerge cependant au travers des multiples tentatives pour préciser la notion, l’ériger en concept, ou en faire plus modestement un objet scientifique dont la nature soit consensuelle. De ce point de vue, une revue rapide de la littérature de spécialité révèle des divergences. Sans négliger les questions épistémologiques et théoriques, il est, en définitive, plus fructueux et productif d’étudier les formes inscrites de l’information et leurs divers supports. C’est ainsi qu’un recentrage s’opère de l’information vers le document, dont la numérisation contemporaine prolonge la longue tradition de l’écrit. Le document a pour vocation de consigner la culture, la mémoire et le patrimoine des sociétés et des organisations. Mais les stic embrassent plus largement toutes les dimensions fonctionnelles du document pour la décision et pour l’action. Les mutations à l’œuvre dans le monde du travail et des échanges, mais aussi au cœur de la création artistique et de l’innovation, conduisent à analyser les pratiques émergentes, les formes nouvelles, les écritures et les modalités communicationnelles que le numérique renouvelle. Avec la massification du recours au numérique, aucun secteur n’est épargné et les stic s’imposent comme un lieu disciplinaire privilégié pour cette famille de recherches et d’enseignements. Document, écritures, éditorialisation, information, inscription, support, sont les concepts qui structurent cet axe de recherche.